GĂ©nĂ©rationKalach: La face cachĂ©e des citĂ©s (Bande Originale Du Documentaire) | Maximilien Mathevon. Stream and download in Hi-Res on and download in Hi-Res on Qobuz.com Streaming plans Download store Magazine Our applications  #BestOf2021 #RMCStory Cette annĂ©e JĂ©rĂŽme Pierrat, spĂ©cialiste du crime organisĂ©, est allĂ© au cƓur des quartiers sensibles de #Marseille RMC Story - GĂ©nĂ©ration Kalach, la face cachĂ©e des citĂ©s GĂ©nĂ©ration Kalach" est une enquĂȘte inĂ©dite sur le banditisme dans les quartiers. Elle montre les faces cachĂ©es des citĂ©s. Entre les fusillades, les affrontements entre bandes et des SuperPumped, la face cachĂ©e d’Uber - 16 juin, dĂ©couvrez les vidĂ©os TV, SVOD sur TĂ©lĂ©-Loisirs PureTV. September 29 at 10:30 AM ·. GĂ©nĂ©ration Kalach : la face cachĂ©e des citĂ©s, le documentaire exclusif, au cƓur des quartiers sensibles marseillais. C'est ce soir Ă  21h05 sur RMC Story. 3:22. PeauCĂ©leste. Aerilate. Transforme les capacitĂ©s de type Normal en type Vol et augmente leur puissance de 20% (30% dans la sixiĂšme gĂ©nĂ©ration). Peau Féérique. Pixilate. Transforme les capacitĂ©s de type Normal en type FĂ©e et augmente leur puissance de PsZJ. Index Plan Texte Notes Citation Auteur EntrĂ©es d’index Haut de page Texte intĂ©gral 1Au cours du XXe siĂšcle, la jeunesse s’affirme dans les reprĂ©sentations collectives comme une pĂ©riode clairement identifiĂ©e entre l’enfance et l’ñge adulte. Cette reconnaissance sociale d’une classe d’ñge s’explique aisĂ©ment par diffĂ©rents facteurs, comme l’allongement de la durĂ©e des Ă©tudes, les relations nouvelles entre parents et adolescents dans un cadre de vie urbain ou encore la promotion de l’image de la jeunesse dans la publicitĂ© et les mĂ©dias. Mais l’affirmation de la jeunesse se double Ă©galement de la revendication d’une culture spĂ©cifique. Le jeune se distinguerait des autres classes d’ñges par une culture commune, qui dĂ©passerait les clivages sociaux. ConsĂ©quence de l’émergence de la culture de masse, cette culture jeune », d’abord musicale, ensuite cinĂ©matographique et audiovisuelle, est l’un des aspects les plus marquants de l’histoire culturelle du monde occidental dans la seconde moitiĂ© du XXe siĂšcle — au mĂȘme titre que l’émergence de la culture de masse ». Et pourtant, Ă  la diffĂ©rence des spĂ©cialistes d’autres sciences sociales, les historiens du temps prĂ©sent » ont assez peu investi ce domaine. Cette brĂšve prĂ©sentation historiographique tentera d’expliquer cette lacune puis dĂ©gagera, en guise de conclusion, de nouvelles pistes de recherches. Les caractĂ©ristiques de la culture jeune » 1 Voir Yolande Cohen, Les Jeunes, le socialisme et la guerre. Histoire des mouvements de jeunesse en ... 2 Voir notamment François Audigier, GĂ©nĂ©ration gaulliste. L’Union des jeunes pour le progrĂšs, une Ă©co ... 3 Cf. Thierry CrĂ©pin, “Haro sur la gangster !”. La moralisation de la presse enfantine 1934-1954, Par ... 2L’idĂ©e d’une spĂ©cificitĂ© de la jeunesse va de pair avec l’affirmation de pratiques culturelles qui, au cours du XXe siĂšcle, deviennent de plus en plus autonomes. Dans la premiĂšre moitiĂ© du siĂšcle, les jeunes sont encore prĂ©sentĂ©s comme passifs dans leur rapport Ă  la culture. C’est le monde adulte » qui prend des initiatives culturelles en direction de la jeunesse. Les mouvements de jeunesse connaissent alors leur essor, reproduisant la diversitĂ© des engagements des aĂźnĂ©s au scoutisme et Ă  l’action catholique, rationalisĂ©e Ă  la fin des annĂ©es 1920 autour des sections spĂ©cialisĂ©es de l’ACJF JAC, JOC et JEC..., rĂ©pond le rĂ©seau des amicales et des oeuvres laĂŻques, oĂč l’influence socialiste est forte1. De leur cĂŽtĂ©, les organisations politiques et syndicales se dotent de structures spĂ©cifiques pour encadrer les jeunes et renouveler leurs viviers militants — ce fait est bien connu depuis les travaux dirigĂ©s par Gilles Le BĂ©guec2. Mais le symbole le plus rĂ©pandu de cette premiĂšre culture jeune, c’est le livre pour enfants, c’est-Ă -dire une littĂ©rature produite par des adultes et rigoureusement encadrĂ©e, comme en tĂ©moigne l’adoption en 1949 de la loi protectrice sur les publications Ă  destination de la jeunesse »3. Comme l’école et la famille, cette production culturelle Ă  destination des jeunes rĂ©pond d’abord Ă  un souci Ă©ducatif. 4 Cf. Jean-Yves Sabot, Le Syndicalisme Ă©tudiant et la guerre d’AlgĂ©rie l’entrĂ©e d’une gĂ©nĂ©ration en ... 5 Voir Laurent Besse, Les Maisons des jeunes et de la culture 1959-1981 Etat, association, munici ... 3Au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, la situation Ă©volue. Les Ă©tudiants s’engagent plus activement, d’abord dans un syndicalisme revendicatif, ensuite dans certains combats de la CitĂ© la guerre d’AlgĂ©rie4. Ils incarnent ainsi une forme spĂ©cifique, quoique minoritaire, d’une action civique de la jeunesse. Au mĂȘme moment, les rĂ©seaux d’éducation populaire prennent conscience que les attentes de l’adolescent ou du jeune adulte sont diffĂ©rentes de celles de l’enfant, et qu’elles supposent donc des mĂ©thodes et des pratiques plus adaptĂ©es s’enclenche ainsi le processus qui conduit Ă  la crĂ©ation des maisons des jeunes et de la culture », au dĂ©but des annĂ©es 19605. Les mĂ©dias diffusent une nouvelle image de la jeunesse — plus autonome, plus rebelle, plus inquiĂ©tante aussi. L’acteur amĂ©ricain James Dean devient le symbole de la fureur de vivre » d’une fraction de la jeunesse occidentale — une fureur » qui reste souvent Ă  l’état de simple fantasme. RĂ©vĂ©lĂ©e Ă  dix-neuf ans avec son rĂ©cit Bonjour tristesse, Françoise Sagan apparaĂźt, elle aussi, comme le vecteur d’une certaine image de la jeunesse, avec ses angoisses et ses excĂšs. À partir de 1958, la Nouvelle Vague du cinĂ©ma français met en scĂšne une jeunesse dont les diffĂ©rents protagonistes suggĂšrent le mĂȘme esprit d’insoumission et de refus du monde adulte c’est bien lĂ  le seul point commun entre l’enfant fugueur des Quatre cents coups François Truffaut, les Ă©tudiants provocateurs des Cousins Claude Chabrol et le jeune criminel en cavale d’À bout de souffle Jean-Luc Godard. Et c’est un public jeune qui assure Ă  ces films un succĂšs public indĂ©niable qui renouvelle en profondeur le cinĂ©ma français. 6 Voir, sur ce point, la mise au point de Jean-François Sirinelli, Le coup de jeune des sixties », ... 4C’est pourtant Ă  propos de musique que les contemporains emploient l’expression culture jeune », au dĂ©but des annĂ©es 1960. La diffusion du rock anglo-amĂ©ricain et son acclimatation Ă  l’industrie musicale française, sous la forme du yĂ©yĂ© », ont jouĂ© un rĂŽle de ciment identitaire Ă  une classe d’ñge — Ă  tel point qu’on a pu parler de gĂ©nĂ©ration Salut les copains », du nom de l’émission radiodiffusĂ©e, lancĂ©e sur Europe n° 1 en 19596. Cette nouvelle culture musicale se distingue clairement de celle qui est destinĂ©e aux enfants alors trĂšs limitĂ©e, la chanson pour enfants se dĂ©veloppant surtout Ă  la fin des annĂ©es 1960 et, a fortiori, des modĂšles culturels des adultes. Cette culture devient un phĂ©nomĂšne gĂ©nĂ©rationnel, parce qu’elle s’inscrit dans une logique de masse. C’est d’ailleurs au moment oĂč les baby boomers arrivent de façon massive Ă  l’ñge de l’adolescence que ce phĂ©nomĂšne apparaĂźt. La jeunesse est ainsi clairement considĂ©rĂ©e comme un marchĂ©, qui justifie un investissement important de la part des industries culturelles le disque, avec Barclay, mais aussi le cinĂ©ma et la radio. Celles-ci ont ainsi tout intĂ©rĂȘt Ă  flatter des aspirations identitaires qui assurent un succĂšs inĂ©dit Ă  leurs productions. De fait, les textes des chansons et des journaux Ă  destination de la jeunesse jouent Ă  la fois sur l’identification du public Ă  ses idoles et sur la communautĂ© d’ñge face Ă  un monde adulte considĂ©rĂ© comme extĂ©rieur, voire hostile. La culture jeune » repose sur une mise en scĂšne du conflit des gĂ©nĂ©rations et sur la logique communautaire, qu’illustre bien le succĂšs des grands rassemblements festifs la nuit des copains », le 22 juin 1963 place de la Nation Ă  Paris, annonce les concerts mythiques de Woodstock ou de l’üle de Wight. 5Cette culture est jeune Ă  la fois par le public qu’elle vise, mais aussi par les mĂ©dias qu’elle utilise. Il s’agit bien d’une culture audiovisuelle qui apparaĂźt alors comme neuve », supportĂ©e par les mĂ©dias de masse — et principalement par la radio. La musique en est l’expression privilĂ©giĂ©e, ce qui sera confirmĂ© lors des dĂ©cennies suivantes. La pop music, puis le punk, la new wave, le rap, la techno deviendront les symboles identitaires de certaines fractions de la jeunesse du dernier tiers du XXe siĂšcle. Autour de la musique se greffent ainsi des comportements individuels et collectifs spĂ©cifiques qui aspirent non seulement Ă  dĂ©passer les clivages sociaux, mais aussi les frontiĂšres nationales. La culture jeune » est, en effet, une culture internationale, Ă  dominante anglo-saxonne c’est l’un des grands vecteurs de la mondialisation — ou, plutĂŽt, de l’amĂ©ricanisation — de la culture. Premiers regards sur la culture jeune » 6Traditionnellement, la presse diffuse auprĂšs du grand public des images spĂ©cifiques — et souvent inquiĂ©tantes — de la jeunesse. DĂšs le XIXe siĂšcle, l’imaginaire collectif s’est constituĂ© de jeunes criminels, vagabonds ou simplement dĂ©viants, en rupture avec l’ordre social. Des Apaches de la Belle Époque aux blousons noirs » de la fin des annĂ©es 1950 et, enfin, aux jeunes des banlieues », dont la violence est rĂ©vĂ©lĂ©e par les premiers Ă©tĂ©s chauds » dans l’agglomĂ©ration lyonnaise au dĂ©but des annĂ©es 1980, tous alimentent un sentiment d’étrangetĂ© et d’insĂ©curitĂ©. Les journalistes Ă©prouvent d’ailleurs la mĂȘme incomprĂ©hension face Ă  certaines formes prises par la culture jeune ». Les dĂ©buts du rock en France ont Ă©tĂ© assimilĂ©s au phĂ©nomĂšne des blousons noirs », les articles sur la culture pop Ă©voquaient complaisamment l’usage des drogues — tandis que la couverture mĂ©diatique du rap et de la techno mentionne volontiers certaines dĂ©rives l’insĂ©curitĂ© urbaine ou le dĂ©bordement des raves. Mais, au fil des dĂ©cennies, les grands news-magazines prĂ©fĂšrent mettre en avant des incarnations plus consensuelles de la culture jeune » — consensuelles au point de fĂ©dĂ©rer les adolescents et leurs parents que l’on songe aux reprĂ©sentations mĂ©diatiques rĂ©currentes du culte dont furent successivement l’objet, dans les deux derniĂšres dĂ©cennies du XXe siĂšcle, Jean-Jacques Goldman, Daniel Balavoine ou Patrick Bruel. Au fur et Ă  mesure que la crise sociale s’étend, l’image dominante du jeune, de ses valeurs, de sa culture devient rassurante — comme s’il fallait suggĂ©rer que le temps du conflit de gĂ©nĂ©rations est terminĂ©. 7 CitĂ© par Michel Winock, Chronique des annĂ©es soixante, Paris, 1990, p. 99. 8 Idem, p. 101-102. 9 Edgar Morin, L’Esprit du temps, Paris, 1962. 7C’est principalement au dĂ©but des annĂ©es 1960 que la culture jeune » suscite les analyses les plus passionnĂ©es, dans les quotidiens populaires comme dans les revues intellectuelles. Des intellectuels de renom s’attachent Ă  dĂ©crire une culture qu’ils ne comprennent pas. Dans Les Nouvelles littĂ©raires, au lendemain de la nuit des copains » du 22 juin 1963, François Nourissier dĂ©crit ainsi cette gĂ©nĂ©ration qui se distingue radicalement de la prĂ©cĂ©dente — la sienne Voici que se lĂšve, immense, bien nourrie, ignorante en histoire, opulente, rĂ©aliste, la cohorte dĂ©politisĂ©e et dĂ©dramatisĂ©e des Français de moins de vingt ans »7. MĂȘme la revue Esprit, qui dĂ©cide de consacrer un dossier Ă  la jeunesse en 1964 et cherche donc Ă  comprendre ce phĂ©nomĂšne, reste dans un discours dĂ©prĂ©ciatif, que Michel Winock alors membre de la rĂ©daction reconnaĂźt vingt-cinq ans plus tard8. Parmi ces intellectuels, le sociologue Edgar Morin fait exception. Dans un article publiĂ© le 6 juillet 1963 dans Le Monde, il analyse en scientifique le phĂ©nomĂšne des copains ». Il montre notamment la rĂ©cupĂ©ration des aspirations identitaires de la jeunesse par les industries de la culture et du spectacle. Morin Ă©crit ainsi que l’adolescence surgit en classe d’ñge dans le milieu du XXe siĂšcle, incontestablement sous la stimulation permanente du capitalisme du spectacle et de l’imaginaire ». Il Ă©numĂšre les Ă©lĂ©ments sur lesquels se cristallise cette identitĂ© gĂ©nĂ©rationnelle des vĂȘtements le jean, le polo, le tee-shirt, le blouson de cuir, diffĂ©rents biens de consommation l’électrophone, la guitare Ă©lectrique, le transistor, le 45 tours, un vocabulaire spĂ©cifique. Il reprend au mĂȘme moment cette analyse dans L’Esprit du temps9 — prolongement de premiers travaux qui avaient plutĂŽt portĂ© sur la sociologie du cinĂ©ma. 10 Paul Yonnet, Jeux, modes et masses, 1945-1985, Paris, 1985. 11 Voir les travaux d’Armand Mattelart, notamment La Communication-monde. Histoire des idĂ©es et des st ... 12 Cf. François Dubet, La GalĂšre. Jeunes en survie, Paris, 1987. 13 Cf. Denis Cogneau et Olivier Donnat, Les Pratiques culturelles des Français, 1973-1990, Paris, 1990 14 Cf. P. Bourdieu dir., La MisĂšre du monde, Paris, 1993. Le succĂšs de cet ouvrage, qui fait la part ... 15 Voir, par exemple, les travaux de Bernard Lahire, La Culture des individus dissonances culturelle ... 8Par la suite, ce sont bien les sociologues — et non les historiens — qui, au sein des sciences humaines et sociales, mĂšnent les analyses les plus abouties sur cette culture jeune, au sein de travaux portant sur des domaines plus larges fonctionnement socio-Ă©conomique de la culture de masse10, mondialisation de la communication et des mĂ©dias de l’information et du divertissement11, sociologie de la production et des pratiques musicales... Depuis les annĂ©es 1980, les sociologues interrogent la notion de culture jeune » dont ils critiquent le fondement mĂȘme ne s’agit-il pas d’une construction mĂ©diatique commode, doublĂ©e d’intentions idĂ©ologiques rĂ©elles visant Ă  masquer le maintien des barriĂšres de classes ? La culture jeune » ne serait-elle pas une illusion, entretenue Ă  la fois par les mĂ©dias et l’industrie culturelle, qui cacherait les difficultĂ©s sociales bien rĂ©elles d’une fraction importante de la jeunesse, que certains sociologues mettent alors en Ă©vidence ?12 Ces analyses critiques s’appuient sur les enquĂȘtes sur les pratiques culturelles des Français, lancĂ©es par le ministĂšre de la Culture Ă  partir de 1973, qui soulignent l’hĂ©tĂ©rogĂ©nĂ©itĂ© des pratiques culturelles de la jeunesse et le maintien des dĂ©terminismes sociaux dans le choix de ces pratiques13. Elle va de pair avec l’influence croissante de Pierre Bourdieu14 et la rĂ©habilitation de grilles d’analyse marxistes dans les sciences humaines et sociales. MĂȘme si, au dĂ©but du XXIe siĂšcle, de nouveaux travaux nuancent cette conception trop mĂ©canique des pratiques culturelles et insistent notamment sur un rapport de plus en plus individualisĂ© Ă  la culture15, ils poursuivent cette remise en cause thĂ©orique d’une culture jeune », trop homogĂšne et uniforme pour correspondre Ă  une rĂ©alitĂ© de plus en plus mouvante. La raretĂ© des travaux historiques 16 Une vision synthĂ©tique est proposĂ©e par Philippe Poirrier, Les Enjeux de l’histoire culturelle, Par ... 17 M. Crubellier, L’École rĂ©publicaine 1870-1940. Esquisse d’une histoire culturelle, Paris, 1993 18 Th. CrĂ©pin, op. cit. 9Les historiens ont Ă©tĂ© plus rares que les sociologues Ă  s’intĂ©resser Ă  cette culture jeune ». Cette rĂ©ticence est d’autant plus surprenante que, depuis le dĂ©but des annĂ©es 1980, l’histoire culturelle apparaĂźt comme l’un des secteurs les plus dynamiques de l’historiographie contemporaine16. Dans un premier temps, les travaux historiques ont surtout portĂ© sur la production culturelle Ă  destination des enfants. Maurice Crubellier a ainsi mis en relation l’histoire de l’éducation et l’histoire culturelle notamment l’histoire du livre et des reprĂ©sentations17. Plus rĂ©cemment, Thierry CrĂ©pin a Ă©tudiĂ© les publications Ă  destination de la jeunesse au lendemain de la Seconde Guerre mondiale18 il a notamment montrĂ© comment les livres les plus diffusĂ©s les bandes dessinĂ©es et les pĂ©riodiques pour enfants notamment intĂ©graient les enjeux idĂ©ologiques de la guerre froide. 19 Voir notamment la thĂšse de Jean-Claude Caron GĂ©nĂ©rations romantiques 1814-1851. Les Ă©tudiants de P ... 20 L. Bantigny, Le Plus bel Ăąge ? Jeunes, institutions et pouvoirs en France des annĂ©es 1950 au dĂ©but ... 21 Sirinelli, Les Baby-boomers. Une gĂ©nĂ©ration 1945-1969, Paris, 2003 ; Sohn, Âge tendre e ... 22 Rioux et Sirinelli dir., La Culture de masse [
], op. cit. 10Depuis le dĂ©but des annĂ©es 1990, l’émergence de la jeunesse — notamment de la jeunesse Ă©tudiante — comme un objet privilĂ©giĂ© d’études historiques19 a confrontĂ© certains historiens Ă  cette problĂ©matique de la culture jeune ». La jeunesse des annĂ©es 1950 a ainsi fait l’objet de l’importante thĂšse de Ludivine Bantigny20, qui met en Ă©vidence les prĂ©mices d’une culture jeune », qui reste encore hĂ©tĂ©rogĂšne. Les dĂ©terminismes familiaux et sociaux, les stratĂ©gies des diffĂ©rents producteurs de cette culture, le cadre dans lequel les pratiques s’effectuent sont autant de facteurs de diffĂ©renciations. Cette dĂ©cennie est autant marquĂ©e par l’apogĂ©e des mouvements de jeunesse que par le rajeunissement des formes Ă©litaires de la culture littĂ©rature et surtout cinĂ©ma. Ces importantes analyses sont toutefois Ă©crasĂ©es par la place lĂ©gitime accordĂ©e Ă  la guerre d’AlgĂ©rie qui constitue une expĂ©rience commune propre Ă  dĂ©velopper une conscience gĂ©nĂ©rationnelle. Les jeunes des annĂ©es 1960 — autrement dit, les baby-boomers — se situent dans un contexte radicalement diffĂ©rent. Anne-Marie Sohn et Jean-François Sirinelli ont conduit des recherches parallĂšles et complĂ©mentaires21. Ils ont accordĂ© une place assez diffĂ©rente aux pratiques culturelles. D’abord spĂ©cialiste d’histoire des femmes et de la vie privĂ©e, Anne-Marie Sohn s’appuie essentiellement sur une enquĂȘte gouvernementale de 1966 et sur la correspondance reçue par l’animatrice MĂ©nie GrĂ©goire qui anime Ă  partir de 1967 sur RTL une cĂ©lĂšbre Ă©mission radiophonique interactive. Elle s’intĂ©resse surtout aux conflits entre vie privĂ©e et vie sociale des jeunes, et elle s’attache d’ailleurs Ă  rĂ©introduire des distinctions sociales dans le rapport des jeunes Ă  l’éducation et Ă  la culture. Les pratiques culturelles en elles-mĂȘmes sont assez rapidement Ă©voquĂ©es. C’est ce qui distingue sa dĂ©marche de celle de Jean-François Sirinelli, pour qui la culture et notamment la culture vĂ©hiculĂ©e par les mĂ©dias de masse est un facteur dĂ©cisif de la conscience gĂ©nĂ©rationnelle des baby-boomers. Une des trois parties de son ouvrage est consacrĂ©e aux petits princes de la planĂšte des jeunes ». Il y Ă©voque d’abord la littĂ©rature enfantine, puis le moment Salut les copains », oĂč se rejoignent Ă©mancipation culturelle et rĂ©volution morale et comportementale. La rĂ©fĂ©rence au modĂšle amĂ©ricain, qui s’incarne dans la figure du teenager, constitue Ă©galement un trait distinctif de cette jeunesse des annĂ©es 1960. Il s’agit lĂ  d’un moment important dans l’histoire de la culture de masse », une histoire longtemps nĂ©gligĂ©e mais qui commence Ă  ĂȘtre explorĂ©e, comme en tĂ©moigne la publication en 2002 d’un ouvrage collectif, coordonnĂ© par Jean-Pierre Rioux et Jean-François Sirinelli22. Celui-ci Ă©voque notamment le coup de jeune des sixties » et l’importance de la jeunesse dans un processus d’acculturation qui, dans le dernier tiers du XXe siĂšcle, gagne l’ensemble de la population française. Ce sont bien les jeunes qui apparaissent comme les mĂ©diateurs d’une culture de masse, mondialisĂ©e et fondĂ©e sur l’image et le son. 23 Voir JĂ©rĂŽme Bourdon, Haute fidĂ©litĂ©. Pouvoir et tĂ©lĂ©vision 1935-1994, Paris, 1994 ; HĂ©lĂšne Eck, La ... 24 Citons notamment les travaux de Ludovic Tournes sur l’industrie du disque et les phĂ©nomĂšnes d’accul ... 25 Mischka Assayas dir., Dictionnaire du rock, Paris, 2001. 26 Cette thĂ©matique a Ă©tĂ© abordĂ©e prĂ©cocement par les historiens, dans la foulĂ©e de Mai 68. Voir, par ... 11Aussi importants soient-ils, ces travaux restent marginaux dans l’historiographie contemporaine. La raretĂ© des Ă©tudes historiques sur la culture jeune » s’explique avant tout par les reprĂ©sentations qui sous-tendent la lĂ©gitimitĂ© des objets d’étude dans le monde universitaire. La culture jeune » relĂšve d’un domaine longtemps dĂ©valorisĂ© et, par consĂ©quent, dĂ©laissĂ© par l’histoire culturelle la culture de masse ». Dans leurs sources et leurs objets, les historiens sont longtemps restĂ©s prisonniers des hiĂ©rarchies implicites qui, au sein des productions culturelles, privilĂ©gient l’écrit. Les Ă©crivains et surtout les intellectuels de l’époque contemporaine ont fait l’objet de multiples ouvrages. En revanche, la culture populaire et surtout les formes audiovisuelles de celle-ci n’ont soulevĂ© qu’un faible intĂ©rĂȘt, sauf lorsqu’elles sont liĂ©es Ă  des questions qui semblent d’une autre importance. Ainsi, la radio et la tĂ©lĂ©vision ont suscitĂ© une abondante bibliographie qui s’est consacrĂ©e aux relations entre ces mĂ©dias et le pouvoir politique23. DĂ©laissĂ©es par les historiens, Ă  quelques exceptions prĂšs24, les formes musicales de la culture de masse du XXe siĂšcle sont laissĂ©es Ă  des Ă©rudits ou Ă  des journalistes spĂ©cialisĂ©s. Aucun historien ne figure parmi les contributeurs d’un rĂ©cent Dictionnaire du rock, qui reprĂ©sente pourtant, par son sĂ©rieux et son exhaustivitĂ©, un ouvrage de rĂ©fĂ©rence sur cette question25. Contrairement au sociologue, l’historien s’intĂ©resse peu aux fans de Sheila, au tĂ©lĂ©spectateur d’HĂ©lĂšne et les garçons ou au lecteur de mangas. En revanche, il se sentira plus Ă  l’aise pour Ă©tudier la figure du jeune politisĂ©, engagĂ© dans les combats de son temps26. Jusqu’à ces derniĂšres annĂ©es, c’est par les travaux sur les Ă©tudiants ou sur les annĂ©es 68 » que l’on connaissait le jeune des annĂ©es 60. 12Ces rĂ©serves sont peut-ĂȘtre en train de s’affaiblir, grĂące Ă  l’affirmation d’une histoire culturelle qui se focalise sur les phĂ©nomĂšnes de diffusion et de rĂ©ception de la culture. Subsistent, en revanche, les difficultĂ©s propres Ă  un type d’histoire qui suppose une multiplicitĂ© d’angles d’attaque pour saisir la globalitĂ© d’un phĂ©nomĂšne aussi complexe que la culture jeune ». L’analyse des fondements Ă©conomiques implique un travail sur des sources, que le milieu des industries culturelles est rarement disposĂ© Ă  ouvrir au regard des historiens. Le travail sur les phĂ©nomĂšnes de rĂ©ception exige Ă©galement une collecte de tĂ©moignages oraux et de sources privĂ©es, qui devient plus difficile au fur et Ă  mesure que l’époque Ă©tudiĂ©e s’éloigne. Ces difficultĂ©s mĂ©thodologiques et documentaires ont pu ainsi dĂ©courager nombre d’initiatives. En guise de conclusion, quelques pistes de recherche.. 13Les sources disponibles permettent toutefois de dĂ©gager des pistes de recherches encore peu explorĂ©es par les historiens français. L’analyse du contenu de la production culturelle de masse Ă  destination de la jeunesse livres, disques, presse spĂ©cialisĂ©e pour adolescents, en plein essor Ă  partir de la crĂ©ation de Salut les copains en 1962, Ă©missions de radio et de tĂ©lĂ©vision, sites internet... reprĂ©sente un corpus quasiment illimitĂ© pour Ă©tudier le discours, l’imaginaire et les mythologies de cette culture jeune » au cours du dernier demi-siĂšcle. Un traitement systĂ©matique de ce fonds documentaire sur la moyenne durĂ©e devrait permettre de suivre une Ă©volution significative, d’un discours uniformisateur au seuil des annĂ©es 1960 Ă  l’éclatement des rĂ©fĂ©rences culturelles de la planĂšte jeunes ». 14Autre thĂšme de recherche le regard portĂ© par le monde adulte » sur cette culture, longtemps considĂ©rĂ©e comme l’indice d’une dĂ©politisation de la jeunesse. Ce topos, qui parcourt l’ensemble du XXe siĂšcle, a sans doute comptĂ© dans la connotation pĂ©jorative liĂ©e Ă  la notion de culture jeune ». Enfin, une mise en perspective historique et critique de ce phĂ©nomĂšne devrait insister sur les diffĂ©rentes formes de rĂ©sistance Ă  cette culture jeune rĂ©sistances internes qui s’affirment au cours des annĂ©es 68 » avec une contre-culture jeune » qui valorise Ă  la fois l’engagement politique et les modĂšles de l’underground ; rĂ©sistances externes qui ont longtemps lĂ©gitimĂ© les dispositifs mis en avant par l’État et les rĂ©seaux associatifs en direction d’une Ă©ducation artistique et culturelle de la jeunesse. La question des pratiques culturelles de la jeunesse renvoie ainsi aux grandes problĂ©matiques de l’histoire culturelle du temps prĂ©sent la place respective des industries culturelles et du secteur public, la mondialisation et l’amĂ©ricanisation croissantes de la production, l’apparente contradiction entre une diffusion de masse et une individualisation de la rĂ©ception. C’est pourquoi la culture jeune » est non seulement un objet lĂ©gitime, mais aussi un observatoire prĂ©cieux des rapports que les sociĂ©tĂ©s contemporaines entretiennent avec leurs cultures. Haut de page Notes 1 Voir Yolande Cohen, Les Jeunes, le socialisme et la guerre. Histoire des mouvements de jeunesse en France, Paris, 1989. 2 Voir notamment François Audigier, GĂ©nĂ©ration gaulliste. L’Union des jeunes pour le progrĂšs, une Ă©cole de formation politique 1965-1975, Nancy, 2005. 3 Cf. Thierry CrĂ©pin, “Haro sur la gangster !”. La moralisation de la presse enfantine 1934-1954, Paris, 2002. 4 Cf. Jean-Yves Sabot, Le Syndicalisme Ă©tudiant et la guerre d’AlgĂ©rie l’entrĂ©e d’une gĂ©nĂ©ration en politique et la formation d’une Ă©lite, Paris, 1995. 5 Voir Laurent Besse, Les Maisons des jeunes et de la culture 1959-1981 Etat, association, municipalitĂ©s, thĂšse, Univ. de Paris-I, 2004. 6 Voir, sur ce point, la mise au point de Jean-François Sirinelli, Le coup de jeune des sixties », Jean-Pierre Rioux et Jean-François Sirinelli dir., La Culture de masse, de la Belle Époque Ă  nos jours, Paris, 2002. 7 CitĂ© par Michel Winock, Chronique des annĂ©es soixante, Paris, 1990, p. 99. 8 Idem, p. 101-102. 9 Edgar Morin, L’Esprit du temps, Paris, 1962. 10 Paul Yonnet, Jeux, modes et masses, 1945-1985, Paris, 1985. 11 Voir les travaux d’Armand Mattelart, notamment La Communication-monde. Histoire des idĂ©es et des stratĂ©gies, Paris, 1992. 12 Cf. François Dubet, La GalĂšre. Jeunes en survie, Paris, 1987. 13 Cf. Denis Cogneau et Olivier Donnat, Les Pratiques culturelles des Français, 1973-1990, Paris, 1990 14 Cf. P. Bourdieu dir., La MisĂšre du monde, Paris, 1993. Le succĂšs de cet ouvrage, qui fait la part belle Ă  des figures de jeunes dĂ©classĂ©s ou en situation d’échec, souligne cette influence au cours des annĂ©es 1990. Notons que, dĂšs 1964, Bourdieu a mis en Ă©vidence les inĂ©galitĂ©s socio-culturelles au sein de la jeunesse Pierre Bourdieu et Jean-Claude Passeron, Les HĂ©ritiers, les Ă©tudiants et la culture, Paris, 1964. 15 Voir, par exemple, les travaux de Bernard Lahire, La Culture des individus dissonances culturelles et distinction de soi, Paris, 2004. 16 Une vision synthĂ©tique est proposĂ©e par Philippe Poirrier, Les Enjeux de l’histoire culturelle, Paris, 2004. 17 M. Crubellier, L’École rĂ©publicaine 1870-1940. Esquisse d’une histoire culturelle, Paris, 1993 18 Th. CrĂ©pin, op. cit. 19 Voir notamment la thĂšse de Jean-Claude Caron GĂ©nĂ©rations romantiques 1814-1851. Les Ă©tudiants de Paris et le quartier latin, Paris, 1991, la synthĂšse de Didier Fischer L’Histoire des Ă©tudiants en France de 1945 Ă  nos jours, Paris, 2000 et la crĂ©ation en 1995 du GERME Groupe d’étude et de recherche sur les mouvements Ă©tudiants. 20 L. Bantigny, Le Plus bel Ăąge ? Jeunes, institutions et pouvoirs en France des annĂ©es 1950 au dĂ©but des annĂ©es 1960, thĂšse, IÉP de Paris, 2003. 21 Sirinelli, Les Baby-boomers. Une gĂ©nĂ©ration 1945-1969, Paris, 2003 ; Sohn, Âge tendre et tĂȘte de bois. Histoire des jeunes des annĂ©es 1960, Paris, 2001. 22 Rioux et Sirinelli dir., La Culture de masse [
], op. cit. 23 Voir JĂ©rĂŽme Bourdon, Haute fidĂ©litĂ©. Pouvoir et tĂ©lĂ©vision 1935-1994, Paris, 1994 ; HĂ©lĂšne Eck, La Radiodiffusion française sous la IVe RĂ©publique. Monopole et service public aoĂ»t 1944-dĂ©cembre 1953, thĂšse, Univ. de Paris-X-Nanterre, 1997. 24 Citons notamment les travaux de Ludovic Tournes sur l’industrie du disque et les phĂ©nomĂšnes d’acculturation dans le domaine de la musique populaire L. Tournes, New OrlĂ©ans sur Seine. Histoire du jazz en France, Paris, 1999. 25 Mischka Assayas dir., Dictionnaire du rock, Paris, 2001. 26 Cette thĂ©matique a Ă©tĂ© abordĂ©e prĂ©cocement par les historiens, dans la foulĂ©e de Mai 68. Voir, par exemple, Aline Coutrot, Jeunesse et politique. Guide de recherches, Paris, de page Pour citer cet article RĂ©fĂ©rence papier Mathias Bernard, La "culture jeune", objet d’histoire ? », SiĂšcles, 24 2006, 89-98. RĂ©fĂ©rence Ă©lectronique Mathias Bernard, La "culture jeune", objet d’histoire ? », SiĂšcles [En ligne], 24 2006, mis en ligne le 20 fĂ©vrier 2014, consultĂ© le 25 aoĂ»t 2022. URL ; DOI de page Auteur Mathias BernardCHEC, UniversitĂ© Blaise PascalArticles du mĂȘme auteur MĂ©moires et miroirs Haut de page Droits d’auteur Tous droits rĂ©servĂ©sHaut de page Des spots jaune et bleu s’agitent dans tous les sens. La tension monte. Dans la salle, les 28 000 fans commencent Ă  crier. Soudain, des feux d’artifice jaillissent de la scĂšne, illuminant sept hommes jeunes qui se mettent Ă  danser. La foule Ă©tait en dĂ©lire ! C’était encore plus impressionnant que le concert de Madonna ! », se souvient la sociologue Sylvie Octobre. ChorĂ©graphies, chants, costumes Ă  paillettes, confettis et autres pyrotechnies. Nous sommes en 2018, Ă  l’AccorHotels Arena de Paris. Les deux premiers concerts en France du groupe BTS se jouent Ă  guichets fermĂ©s. Un an plus tard, Ă  Cannes, Bong Joon-ho reçoit la Palme d’or pour son film Parasite. C’est la premiĂšre fois qu’un Sud-CorĂ©en remporte ce prix. ConsĂ©cration quelques jours plus tard il repart avec quatre statuettes de la cĂ©rĂ©monie des Oscars.

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